Publié par : PBY-Catalina | 22/10/2010

Sauver des vies -Search and Rescue (5)

Nous avons laissé Jack Foss en plein océan atlantique, affamé mais surtout assoiffé. La situation est de pire en pire : ce qui reste de l’équipage (deux hommes sont morts après avoir bu de l’eau de mer, ne supportant plus la soif qui les tenaillaient) lutte désespérément pour leur survie et les chances semblent de plus en plus maigres. Les rations sont réduites à une tablette Horlicks par jour et par aviateur…

Tôt le lendemain matin, au sixième jour passé sur l’océan, deux hydravions Sunderland survolèrent les survivants, lesquels étaient en bien trop mauvais état physique pour se lever et manifester leur présence. Les quadrimoteurs larguèrent des équipements de survie et autres rations, mais seuls quelques uns furent récupérés car les aviateurs étaient à bout de force pour tout collecter. Un kit de premier secours était compris dans le lot, suspendu au bout d’un parachute, mais en dépit des efforts réunis des cinq naufragés, il ne put être ramené à bord du canot gonflable, car son poids était trop lourd. Les suspentes du parachute furent coupées et la canopée offrit alors une protection relative contre le vent. Dans un des paquets se trouvait des signaux de détresse, ce qui rassura les aviateurs car cela leur permettrait de garder le contact au cas ou ils seraient à nouveau survolés de nuit.

"Maintenant votre premier travail, sergent, sera de bâtir un mess des officiers". Ce cartoon publié dans une des revues distribuées au sein des escadrilles du Coastal Command de la RAF tentait de prendre avec humour une situation qui ne l'était absolument pas pour les équipages. Encore moins pour ceux du Coastal Command, appelés à de longues patrouilles au-dessus des océans et de ce fait n'ayant que de maigres chances d'être secourus rapidement en cas de problème ou d'amerrissage forcé.

Puis la situation des naufragés se compliqua car le canot gonflable fuyait et il leur fallut désormais regonfler régulièrement leur radeau. Leurs dernières forces furent ainsi consommées, mais l’espoir d’être secourus désormais rapidement leur permit de rester en vie. Cette nuit là, des hydravions Catalina revinrent et les aviateurs s’étant préparés, ils signalèrent leur position grâce aux signaux de détresse, jusqu’à ce que les machines ne rentrent à leur base.

Jack Foss ne précise pas à quelle escadrille étaient rattachés les PBY Catalina qui survolèrent les naufragés. Les appareils appartenaient très probablement à une escadrille canadienne, tel cet appareil que l'on voit évoluer au-dessus de la surface de l'océan.

Le lendemain matin, l’un des naufragés fut pris d’une crise de délire et après avoir essayé de mordre chacun des autres pendant plus d’une demi-heure, il s’effondra sur le plancher du radeau. Il avait tenté de mordre la veine jugulaire de Bill, pour lui en sucer le sang. Épuisés après avoir lutté pour contenir les accès de folie de leur camarade, les aviateurs qui n’étaient désormais plus que quatre s’effondrèrent à leur tour dans le fond du canot pour reprendre leur souffle. Environ une heure plus tard, deux Sunderland les survolèrent, le premier faisait des cercles tout autour du radeau et l’autre se dirigeait dans une direction pour en revenir et répéter la manœuvre plusieurs fois de suite. Le sauvetage n’était désormais plus qu’une question de minutes. « Nous avions franchi nos dernières limites à tel point que peu nous inquiétait alors de savoir si une opération de récupération allait être entreprise. Cela n’avait plus d’importance. Nous nous sommes mis d’accord pour gonfler une dernière fois le canot et si nous n’étions pas secourus au moment où il se dégonflerait, nous coulerions avec puisque notre volonté, notre envie de survivre nous avait quittés depuis longtemps déjà », commenta Foss.

 

Le HMS Wildgoose tel qu'il opérait en 1943. C'est ce navire de la Royal Navy qui sauva Jack Foss et les membres de l'équipage rescapés, après avoir dérivé sur plus de 900 km dans l'océan atlantique. Sur les 9 aviateurs partis patrouiller le golfe de Gascogne, 6 périrent ou furent victimes des suites de leur naufrage. Quand à Jack Foss, réaffecté par la suite en Grande-Bretagne, il fut porté disparu quelques mois plus tard avec son nouvel équipage, à la suite d'une mission à la veille du débarquement dont il ne revint pas.

Heureusement pour les aviateurs, à peu près 12 minutes suite à cette décision, un bâtiment de la Royal Navy, le HMS Wildgoose apparut à l’horizon. Au lieu de se réjouir ou de crier de joie, les survivants restèrent assis en pleurant jusqu’à ce qu’ils soient à bord du navire. Ils furent alors emmenés dans le carré des officiers et reçurent chacun une tasse de café chaud, qu’ils burent comme s’il s’agissait d’un élixir de jouvence. Le médecin de bord s’occupa ensuite d’eux, Foss se retrouva dans une cabine car il n’y avait plus de place dans l’infirmerie. Plus tard, lorsque la nuit fut tombée, un autre des naufragés mourut, puis ce fut au tour de Bill. Foss ne fut averti qu’une semaine plus tard, car le personnel médical souhaitait qu’il ait retrouvé suffisamment de forces pour pouvoir affronter la nouvelle : « J’ai passé toute cette journée couché, pensant à eux, ce au travers de quoi ils étaient passés, combien ils avaient souffert avant d’être secourus et de se retrouver saufs à bord du bateau pour mourir après avoir enduré tout cela en vain ».

La Royal Navy les inhuma en mer. Des neuf aviateurs qui s’étaient envolés de Gibraltar sur le Liberator, seuls trois survécurent à la patrouille qu’ils avaient entamée et au long séjour qu’ils effectuèrent sur l’océan Atlantique, dérivant sur une distance de plus de 900 kilomètres, à environ 550 kilomètres des côtes portugaises. Foss ne survécut pas à la guerre. Affecté à une escadrille du Coastal Command dans le sud-ouest de la Grande-Bretagne en préparation du débarquement, il périt au cours d’une patrouille de nuit en mai 1944. Son appareil et les membres d’équipage qui l’accompagnaient disparurent sans laisser de trace, ni avoir lancé aucun signal de détresse…

Traduit et adapté par Antony Angrand.


Réponses

  1. Merci pour la fin de ce témoignage poignant 🙂

    • Il n’y a pas de quoi, l’histoire -et spécialement celle du Cat’- est avant tout une affaire humaine.

  2. Interessant et instructif, du coup je me suis renseigné sur la potabilité de l’eau de mer. Ils sont vraiment forts je trouve du début à la fin.. resister à plusieurs chasseurs, pour amerrir, puis s’extirper de l’appareil sous l’eau avec les blessures… c’est vraiment un témoignage poignant. Merci.


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